
Le père Ulrich Zeimers vend TSE à son fils Peter
« À ce moment-là, il n’y a pas de place pour les sentiments »
ENTREPRENEURIAT
Les entreprises familiales de transport en bus sont parfois confrontées à des difficultés de succession. En effet, chaque nouvelle génération ne souhaite pas forcément rester active dans le secteur des autobus. Dans les Cantons de l'Est, la famille Zeimers n’a aucun problème à ce sujet. Même s’ils le font à leur manière. Au printemps dernier, le fils Peter (32 ans) a repris une partie de l’entreprise de bus de son père Ulrich (63 ans), située à Eupen. « Mais je ne rachète que les parties qui m’intéressent. J’ai en effet ma propre façon de voir les choses, » indique Peter. Le père, Ulrich, semble rassuré : « J’ai toute confiance en Peter pour prendre les bonnes décisions. »
Peter sera la quatrième génération des Zeimers à suivre les traces du fondateur Joseph Zeimers, actif dans le secteur des autobus depuis 1929. Quel sentiment cela vous procure-t-il ?
Ulrich Zeimers; « De la fierté ! Mais également du soulagement. Les autobus sont ma vie, mais je voulais lever un peu le pied. En 1999, j’ai été le cofondateur de TSE. C’est une entreprise d’autocars et d’autobus située à Eupen, mais également une agence de voyages. Le 1eravril, j’ai vendu la majeure partie de l’entreprise à Peter. Je garde un autocar pour moi, car l’agence de voyages n’est pas reprise par Peter. Désormais, je circule en Europe avec ce car pour des circuits que je compose moi-même. J’ai une clientèle très fidèle en Belgique germanophone. Je veux continuer à proposer mes services à ces clients. Mais je ne fais plus rien d’autre. »
Alors, cela tombait bien que Peter cherche justement à s’agrandir ?
Peter Zeimers : « Disons que ce choix de mon père était une opportunité pour moi. En 2022, j’ai fondé ma propre entreprise de bus. C’est délibérément que j’ai choisi à l’époque de ne pas travailler pour mon père. J’avais ma propre façon de voir les choses. Je pensais pouvoir mieux y parvenir si je ne travaillais pas sous la direction de mon père. Par exemple, les longs voyages en car à travers l’Europe ne me convenaient pas. J’ai une famille avec des enfants en bas âge. J’essaie donc de passer suffisamment de soirées à la maison. Mais nous collaborions beaucoup. Entre-temps, mes activités ont pris de l’ampleur. Au point que parfois, nous empiétions même sur le terrain l'un de l’autre. J’ai maintenant racheté trois bus à mon père et plusieurs de ses chauffeurs roulent également pour moi. Je m’occupe des réservations en cours. Seuls les voyages en autocar restent entre les mains de mon père. »

Peter doit prendre ses décisions lui-même. À ce moment-là, il n’y a pas de place pour les sentiments.
Ulrich Zeimers
Les pièces du puzzle s’assemblent donc parfaitement pour vous deux.
Peter Zeimers : « Je n’ai repris que les parties de l’entreprise de mon père qui m’intéressaient. Je sais que TSE est l’œuvre de toute une vie pour mon père, mais on ne peut pas se laisser guider par les émotions dans ce genre de décisions. Je regarde les chiffres. Je sais que certaines personnes ne s’adapteront pas chez moi. Dans ce cas, il vaut mieux ne pas le faire. Si je n’ai pas confiance, je ne le fais pas. Je n’étais pas intéressé non plus pas les bus anciens. Je n’ai repris que les parties qui pouvaient faire progresser ma propre entreprise. »
Ulrich Zeimers : « Je trouve cela correct. Peter doit prendre ses décisions lui-même. À ce moment-là, il n’y a pas de place pour les sentiments. Je ne m’en suis pas mêlé. J’aurais également pu dire : c’est tout ou rien ! Mais dans ce cas, cela aurait été rien. Bien que Peter soit jeune, il a beaucoup d’expérience dans le secteur. Il a grandi parmi les autocars. Il connaît parfaitement ce milieu. Il a aussi été chauffeur et a lui-même nettoyé des bus. Et encore maintenant d’ailleurs. Je me rends compte que la jeune génération ne fait pas les choses de la même manière que la mienne. Mais j’ai toute confiance en Peter pour prendre les bonnes décisions. » Cela m'a ainsi permis de lâcher prise rapidement.
Peter Zeimers : « Mon père avait toutefois une condition : tout devait être clôturé avant la nouvelle saison ! Il ne se sentait pas capable de gérer encore un été une grande entreprise. Normalement, une reprise d’entreprise familiale prend entre un an et un an et demi. Nous avons réglé cela en quatre mois ! Nous avons fait appel à des experts et établi un planning très serré. Le 1er avril, tout était finalisé. Cela n’a été possible que parce que nous avions une confiance aveugle l’un en l’autre, en tant que père et fils. Nous savions l’un comme l’autre qu’aucune information financière ou autre ne serait dissimulée. »

En plus de Peter, vous avez quatre autres enfants. Comment organiser une telle reprise d’entreprise de père en fils sans tensions familiales ?
Ulrich Zeimers : « Je ne voulais absolument aucun désaccord entre les enfants. Il faut savoir que mon frère et moi avons un jour repris l’entreprise de notre père. Au final, nous avons chacun suivi notre propre chemin et sommes en quelque sorte devenus concurrents. C’est pourquoi je voulais une reprise qui se fasse dans la meilleure entente possible entre les frères et sœurs. Nous avons donc d’abord eu une discussion ouverte en présence de tous les enfants. Tout le monde a pu y donner son avis. »
Peter Zeimers : « Je reconnais qu’une telle discussion en commun a effectivement créé un peu de tension dans la famille. Si un frère ou une sœur avait eu un problème avec ce projet, il n'aurait pas abouti. J’aurais alors fait autre chose. Mais nous nous en sommes bien sortis. Voyez, si quelqu’un avait souhaité faire quelque chose de similaire, il aurait franchement pu le faire. Mais mes frères et sœurs avaient d’autres priorités. J’ai aussi dit dès le départ que je voulais tout payer correctement. Pas de dons, rien de caché, avec un plan de remboursement clair. Je n’ai pas exigé de traitement de faveur parce que je reprenais l’entreprise de mon père. La valeur de la reprise a été déterminée par un expert indépendant et nous l’avons tous acceptée. »

Comment voyez-vous l’avenir ?
Peter Zeimers : « Je ne regarde jamais loin dans le futur. Tout change constamment. C’est pourquoi je garde toujours toutes les pistes ouvertes. Cela ne veut pas dire que je suis contre le changement. Nous ne savons tout simplement pas toujours comment les choses vont évoluer. Il faut en être conscient. Je suis convaincu qu’il y aura toujours des bus en circulation. Donc, à cet égard, je pense que je travaille dans le bon secteur. »
Ulrich Zeimers : « Je vais encore organiser des voyages en autocar pendant un an. C’est ce que je préfère faire. Même si je ne sais pas si ce type de tourisme a encore un long avenir. Mais j’arriverai bien à atteindre ma pension de cette manière. Je pourrai alors m'arrêter là. »
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