ENTREPRENEURIAT

Heuvelmans Personenvervoer a formé Franky, pour qu'il devienne chauffeur
“J’étais isolé socialement. Je reçois maintenant des petits mots de remerciement d'élèves.”
Il y a trois ans, Franky Holsteens de Pelt est entré chez Heuvelmans Personenvervoer à Hamont. Pouvait-il devenir chauffeur de bus ? Oui, c’était possible, car il n’y a jamais trop de chauffeurs. Seulement, il était déjà à la maison depuis dix ans en tant que malade de longue durée. Mario Heuvelmans, le directeur, a toutefois accédé à sa demande. Trois ans plus tard, Franky est un chauffeur discret mais précieux pour les services scolaires. “Si vous êtes souple et donnez à la personne le temps de s’adapter à un environnement de travail, je ne vois pas pourquoi cela ne marcherait pas,” indique Mario Heuvelmans.
Dix ans à la maison suite à un burn-out
Mario Heuvelmans : “85 % de nos trajets sont des services scolaires. Ces chauffeurs ont un profil spécifique. En général, il ne s’agit pas d’un emploi à temps plein, ils doivent commencer tôt et ils ont des heures libres pendant la journée. Tous les chauffeurs ne sont pas forcément partants. Mais lorsque Franky est venu frapper à notre porte, il s’est avéré que cela correspondait à ses attentes. Il a autrefois travaillé pour une entreprise de bus, mais il a été en arrêt maladie pendant une longue période. Franky voulait retravailler, mais il avait besoin de temps pour se réhabituer à ce travail. Dans le transport scolaire, je pouvais lui proposer cela. S’il n’y arrivait pas un jour, il pouvait rester chez lui et réessayer le lendemain.
Franky Holsteens : “En 1993, j’ai débuté en tant que chauffeur de bus. Je conduisais un autocar vers des destinations à l’étranger. Lorsque je me suis marié, je suis passé au transport de marchandises. Cela se combinait mieux avec une vie de famille. Mais mon problème est que j’ai du mal à dire non. Mon patron me donnait toujours plus de travail, des trajets plus longs si bien que j’ai fini par sombrer dans un burnout. Je suis resté dix ans à la maison sans occupation. Après un certain nombre d’années, j’ai commencé à me sentir mieux et, quand je regardais par la fenêtre, je voyais des bus passer. Je voulais revenir parmi les humains, prendre du plaisir dans un travail. Je devenais fou entre mes quatre murs.”

« Pour moi, c'était un grand pas. J'étais chez moi depuis dix ans… »
Franky Holsteens
Besoin de temps pour progresser
Mario Heuvelmans : “ Franky est entré ici un jour et a raconté son histoire. Nous avons en permanence des postes vacants pour des chauffeurs. Je voyais des possibilités pour Franky. Il avait un passé de chauffeur de bus, mais hormis son permis de conduire, toutes les attestations avaient expiré. Nous allions mettre cela en ordre. Du fait de sa longue absence, je comprenais également que je devais accorder du temps à Franky pour se réadapter au job et à un environnement de travail. Mais le point le plus important était que j’avais devant moi quelqu’un qui voulait reconduire. Je voyais que cette démarche qu’il avait entamée lui-même était importante pour lui en tant que personne.”
Franky Holsteens : “Pour moi, c’était une grande étape. J’étais resté dix ans à la maison ... Quand je me suis rendu au VDAB, ils m’ont dit que je ne convenais pas pour les offres d’emploi. Pour la mutuelle aussi, il n’était pas nécessaire que je retravaille. Pendant ma période de maladie, jamais un médecin n’est venu pour examiner si je pouvais retravailler. Je devais simplement me résigner à ma situation. Mais je me sentais à nouveau prêt. La première discussion avec Mario m'a également procuré de bonnes sensations. Il semblait y croire. Il allait me donner une chance. Si cela n’allait pas, je devais le faire savoir immédiatement. Je venais d’une situation d’isolation sociale peu structurée et je devais maintenant conduire un bus rempli d’enfants. Je suis reconnaissant à Mario de m’avoir donné cette chance.”

Ne pas retomber dans le piège
Mario Heuvelmans : “Trois années se sont écoulées depuis lors. Franky effectue son service scolaire fixe tous les jours, dans le cadre d'un horaire de 20 heures par semaine. C’est parfait pour lui. Il est toujours parfaitement à l’heure et en tenue soignée, effectue son trajet sans problèmes et les clients et les enfants sont satisfaits. Pour nous, c’est un collaborateur formidable. Nous savons tous deux qu’il a du mal à dire non. Les chauffeurs doivent souvent se remplacer les uns les autres, parfois à la dernière minute. Je préfère éviter ce stress à Franky. Je lui demande cependant parfois de conduire le bus au garage ou au contrôle technique.
Franky Holsteens : “J’ai maintenant 61 ans, mais je peux encore continuer dix ans de cette manière. A posteriori, j’aurais dû faire cette démarche plus tôt. Cela m’aurait permis de ne pas perdre dix ans à la maison. Car je n’y étais pas heureux non plus. Mais personne n'avait été là pour me guider dans ce processus. Si je n’avais pas pris moi-même l’initiative, je serais encore à la maison aujourd’hui.

« Les malades de longue durée ont leur propre histoire. Il faut les écouter. »
Mario Heuvelmans
Les malades de longue durée en tant que partie de la solution
Mario Heuvelmans : “Je suis convaincu que d’autres personnes se trouvent dans la même situation que Franky. Nous sommes confrontés à une pénurie de chauffeurs, qui peut être partiellement solutionnée par des personnes qui ont son profil. Seulement, je ne sais pas non plus où les trouver. Où sont-ils enregistrés ? Je ne pense pas les trouver au VDAB non plus. Qui assume le rôle de facilitateur pour nous mettre en contact ? Je ne vois rien bouger à cet égard. Finalement, c’est du travail sur mesure. Les malades de longue durée sont des personnes qui ont chacune leur histoire. Il faut les écouter. Ce sont des personnes qui ont des points forts, mais également des risques de retomber dans le piège. En tant qu’entrepreneur, il faut être capable de gérer cela avec souplesse. Mais il est possible d'obtenir de beaux résultats. Je sais que Franky conserve dans sa poche un petit mot de remerciement d’un élève et de sa maman. Ces mots signifient beaucoup pour lui. Ils lui vont droit au cœur. Ce petit geste donne à tout cela beaucoup de valeur pour lui.”
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