« Nous avons construit quelque chose de beau, en famille »

Edgar Van Assche (86 ans) de Micheline Cars a sillonné les routes pendant 60 ans

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Le Code 95 d’Edgar Van Assche (86 ans) arrivera à échéance le 24 avril 2022. Le rideau tombe sur une carrière de près de 60 ans pour le fondateur de Micheline Cars à Willebroek. L’heure de jeter un coup d'œil dans le rétro pour ce gaillard de 80 ans qui aura été un pionnier dans notre secteur à bien des égards.

De dépanneur à exploitant d’autocars

Le 1er mai 1963, Edgar Van Assche commence son parcours professionnel par l’acquisition d'un camion, qu’il transforme vite en véhicule de dépannage. « À l'époque, il y avait souvent des accidents sur l’A12. J’allais donc remorquer les véhicules impliqués. » Deux ans plus tard, il entrevoit une nouvelle opportunité dans le transport d’ouvriers. « Beaucoup de gens de la région travaillaient au port d’Anvers. Ils ne possédaient pas de voiture et devaient pourtant s’y rendre d’une façon ou d’une autre. Les usines n’organisaient pas le transport elles-mêmes. » C’est ainsi qu’Edgar acheta son premier car en 1965 pour assurer des déplacements domicile-travail entre Willebroek et Anvers.

Edgar donne à son entreprise le nom de sa fille. Micheline (62 ans) n’est alors qu’une jeune enfant. Elle rejoindra plus tard l’entreprise qui porte son nom. L’agence de voyages Globe à Anvers est rachetée. Gérée par Micheline, l’agence travaille en étroite collaboration avec Micheline Cars. La maman Carola (85 ans) est déjà de service dans la société familiale. Edgar sourit : « Elle a été mon premier chauffeur. Nous avions beaucoup de travail. Je lui ai donc demandé de passer aussi son permis et elle était d’accord. Nous sommes toujours enthousiastes dans ce que nous entreprenons. »

Voir la mer

Les deux frères de Micheline, Eric (59 ans) et Michel (53 ans), travaillent aussi comme chauffeurs pour l’entreprise familiale. Aujourd’hui, les membres de la famille sont les seuls travailleurs de l’entreprise. « Durant nos années de gloire, nous avions une flotte de six ou sept autobus. Aujourd’hui, nous en avons encore trois. À l'époque, trouver des chauffeurs n’était déjà pas une mince affaire », explique Eric. « Notre flexibilité a toujours été l’un de nos atouts. Aujourd’hui encore, nous essayons toujours d’offrir une solution à nos client en cas de demande de dernière minute. » Micheline enchérit : « Un collègue m’a dit un jour que Micheline Cars était la réponse aux cas désespérés. Quand personne ne trouve de solution, bien souvent, nous l’avons ! »

Lorsque les billets d’avion étaient plus chers, Edgar sillonnait les routes d’Europe avec des groupes de voyageurs. « Nous n’avons jamais assuré de services réguliers. En revanche, le tourisme faisait partie de notre offre. J’ai emmené à Blankenberge ou à Ostende de nombreux habitants de Willebroek qui n’avaient encore jamais vu la mer. Dans les années septante, une véritable procession d’autobus se rendait en Espagne en été. C’était la belle époque. Nous avons roulé jusqu’en Europe de l’Est lorsque le Rideau de Fer existait encore. J'étais parmi les derniers autobus occidentaux qui ont quitté la Yougoslavie lorsque la guerre a éclaté. J’ai encore réussi à passer la frontière en passant par de petites routes. »

« Il faut faire attention à tellement de choses »

Aujourd'hui, le rideau tombe sur la carrière de chauffeur d’Edgar. « Je pourrais encore renouveler mon code 95. Je conduis encore très bien mon autobus. Lorsque quelqu’un dit « Oula, un vieux au volant », il vient généralement me féliciter ensuite pour ma conduite. J’ai plus de mal avec tout ce qui gravite autour. Il faut faire attention à tellement de choses, faire des recherches et tout régler au préalable, ne fût-ce que pour pouvoir déposer un groupe de personnes dans un centre-ville, par exemple. C’est devenu compliqué. Mieux vaut sortir dès à présent par la grande porte. »

Mais ce n’est pas un arrêt complet. « Papa reste le CEO », rigole Micheline. « Il aura toujours le dernier mot sur tout. »

« Nous avons vécu de beaux moments »

Entre-temps, la troisième génération de Van Assche est là, mais n’est pas intéressée par une implication dans l’entreprise familiale. « Je ne regrette rien, mais c’est quand même un travail dur. Nous avons été confrontés à une grande incertitude ces deux dernières années et l’avenir est aussi incertain. » Les trois enfants d’Edgar pensent continuer encore pendant un certain temps. « Nous pourrons sans doute encore renouveler une fois notre petite flotte d’autobus. Ensuite, nous devrons être attentifs à la question des moteurs électriques. » Papy Edgar opine du chef, mais voit les choses avec plus de philosophie : « Mes petits-enfants trouveront leur propre voie. À chaque époque ses opportunités. Je n’aurai pas de regrets si Micheline Cars disparaît à la retraite de mes enfants. Nous avons construit quelque chose de beau et avons vécu de beaux moments », conclut-il, serein.